la vie d'Okichi

6 octobre 2006

La suite:

Shimoda est une ville importante dans l'histoire contemporaine japonaise, au tournant de la modernisation du Japon.

C'est ici qu'est arrivé "le bâteau noir" du commandant Perry qui est venu ouvrir les frontières commerciales du Japon, et établir des relations avec le monde extérieur, surtout les Etats -Unis. A partir de ce moment, l'Amérique a forcé les Japonais à sortir de leur isolement.

Les négotations ont pris du temps. Elles furent menées du côté américain par le consul Harris, qui était venu avec son interprète Heusken. Dans cette négotiation politique autant qu'économique, il y a l'histoire tragique d' Okichi.

C'est l'histoire d'une belle femme de campagne, qui devint geisha, membre d'un parti nationaliste à Kyoto, geisha de nouveau, et coiffeuse.
C'est l'histoire d'une femme qui renonce à son amour.
C'est l'histoire d'un renoncement au nom des intérêts de la nation.
C'est l'histoire d'un amour avec un étranger.
C'est l'histoire d'une femme qui retrouve son amant, et se sépare de nouveau.
C'est l'histoire d'un étranger qui est venu au Japon et rentré dans son pays.
C'est l'histoire d'une femme qui obéit aux injonctions de la nation, et qui s'en trouve blâmée par l'opinion.
C'est l'histoire de l'opinion qui la laisse dans le ruisseau, morte.
C'est l'histoire de l'opinion qui a des remords.
Je ne sais pas quelle est l'histoire, mais la voici. Les versions diffèrents, et comme je n'ai accès qu'à quelques sources je vais vous la retracer à partir des quelques indications que je connais.
Elle est née le 10 décembre 1841 dans la petite ville de Shimoda, pas plus grosse qu'un bourg au bord de la mer. A l'âge de 7 ans elle fut adoptée par la famille Murayama, et on lui a enseigné les arts pour être geisha. Elle était belle et très douée, et devint, donc, très populaire.
Le 1er novembre 1854, suite à un raz de marée, sa maison, ainsi que beaucoup de cette ville, fut détruite et elle se réfugia dans la montagne avec sa mère et la mère d'un de ses amis d'enfance. Cet ami, charpentier de son état, lui construisit une maison, et la consola. Ils tombèrent amoureux.
Le 21 juillet 1856, le consul Harris est arrivé à Shimoda pour tenir les négociations commerciales entre le Japon et les Etats-Unis.
Soit elle fut engagée comme servante chez ce consul, soit, le gouvernement japonais voulant se donner un avantage dans les négociations qui trainaient, la forcèrent à s'engager auprès de ce consul. Ils dirent à son amoureux, qu'il devait renoncer lui-aussi à son amour, et qu'il le ferait Samourai (belle promotion sociale). Non sans acharnement de la part des officiels japonais, elle finit par se résoudre aux pressions, et aux nécessités de la nation, et s'engagea auprès du consul, à partir du 21 mai 1857. Sitôt fait, sitôt les négociations aboutirent, et le peuple la blamère.
A/ Le 8 juin 1859, le consul Harris déménagea à Tokyo, la capitale, ce qui est plus pratique. Mais peu après le consul dut retourner aux Etats-Unis. Ensuite, elle devint membre d'un parti nationaliste à Kyoto, et travailla de nouveau comme geisha à Mishima. Et elle ouvra un salon de coiffure, et ne le gérant pas bien a fait faillite. Apprenant la nouvelle de l'américain Harris, elle s'est suicidée. Personne ne voulait lui donner de funérailles. Seul un moine l'a fait. (version du musée d'Okichi).
B/ Elle ne s'est pas faite à sa nouvelle situation et pleura son fiancé. Elle protégea le consul d'un attentat fomenté par des nationalistes. Ne pouvant vraiment pas oublier son fiancé, elle fut relevé de ses fonctions après plusieurs mois de services. Mais, Harris étant tombé malade, elle fut rappelé à son chevet par les autorités japonaises. Après elle est parti à Kyoto, pendant 2 ans. Mais ensuite, elle eut la chance de retrouver son fiancé à Yokohama. Ils vécurent ensemble, lui, le charpentier, elle, la coiffeuse. Mais après être revenu à Shimoda, elle mena une vie dissolue, et dut divorcer. Son fiancé mourut à 39 ans, et sa mort la réveilla de sa vie. A 42 ans, elle ouvrit un restaurant à Shimoda, mais ne sachant pas bien gérer son affaire, elle dut le vendre. Elle apprit la mort du consul américain, et se suicida.